Train de vie six mois pour ajuster le tir
Au Québec, l’espérance de vie est actuellement d’environ 80 ans pour les hommes… mais un homme peut vivre plus vieux.
Les chiffres
REER : 175 000 $
CELI : 57 000 $
Épargne non enregistrée : 10 000 $
Total des cotisations au RRQ : 55 325 $
Maison payée : valeur de 362 000 $ (évaluation municipale de la maison et du terrain)
Taxes municipale et scolaire annuelles : 3151 $
Revenu d’emploi annuel : 80 000 $, soit environ 53 000 $ net
François* aura 64 ans en janvier et il prévoit de prendre sa retraite l’été prochain. Il veut avoir des conseils pour optimiser sa situation à la retraite et prolonger le plus possible sa sécurité financière.
La situation
François est technologue en architecture et il a travaillé toute sa vie comme salarié dans le privé. Il n’a pas de caisse de retraite. Célibataire, il a quelques économies dans son REER et dans son CELI. Il est aussi propriétaire résidant d’une petite maison unifamiliale de style shoebox, historiquement associée à la classe ouvrière, dans l’arrondissement de Ville-Marie, à Montréal. Sa propriété est payée et François n’a pas de dettes. Il ne possède pas de voiture et il utilise les transports en commun ainsi que des taxis à l’occasion. Il a un train de vie peu élevé qu’il évalue à environ 35 000 $ par année. François estime qu’il aura environ le même train de vie à la retraite.
« Je prévois de vendre ma propriété dans environ 5 ou 10 ans pour ensuite louer un petit appartement, probablement un 3 ½, qui coûte autour de 800 ou 1000 $ par mois actuellement », précise-t-il.
Il prévoit de demander sa rente du Régime de rentes du Québec (RRQ) ainsi que la pension de la Sécurité de la vieillesse à 65 ans et, pour les premiers mois de sa retraite, de piger dans son REER ou dans son CELI.
Le risque de la longévité
André Lacasse, planificateur financier chez Services financiers Lacasse, souligne d’abord que l’idéal est toujours de vérifier si son plan de retraite fonctionne lorsqu’on est beaucoup plus jeune afin de pouvoir plus facilement se réajuster au besoin.
Ensuite, il insiste sur l’importance de se pencher sur la question de l’espérance de vie. Au Québec, pour les hommes, elle est actuellement d’environ 80 ans. Mais André Lacasse réalise que, souvent, les gens minimisent le risque de longévité.
PHOTO MARTIN CHAMBERLAND, LA PRESSE
André Lacasse, planificateur financier chez Services financiers Lacasse
« C’est une moyenne, alors il y a des gens qui vivent beaucoup moins longtemps que ça, mais d’autres qui vivent beaucoup plus longtemps, affirme-t-il. Il faut être prévoyant. »
Il travaille donc avec un horizon de 30 ans pour les années de François à la retraite, ce qui l’amène à 94 ans. Or, avec des prévisions assez prudentes qui tiennent compte du rendement des placements, de la vente de la maison et de l’inflation, André Lacasse arrive à un épuisement du capital de François un peu avant cet âge. L’idéal est donc de penser à des stratégies pour prolonger la durée des économies de ce futur retraité.
Reporter la rente du RRQ
La rente du RRQ et la pension de la Sécurité de la vieillesse sont les seuls revenus dans le budget de François qui sont garantis et indexés.
En 2020, quelqu’un qui a le droit à la rente maximale du RRQ — François y est presque — et qui commence à la recevoir à 65 ans aura 1177 $ par mois, soit environ 14 000 $ annuellement. Mais si la personne a attendu avant de demander sa rente et qu’elle commence à la recevoir à 70 ans en 2020, elle obtiendra 1672 $ par mois, soit 20 064 $ par année. L’augmentation est de 42 % et c’est ensuite ce montant qui sera indexé chaque année.
« Le régime du RRQ vaut de l’or, affirme André Lacasse. C’est le premier élément qui aidera François à sécuriser son avenir. »
Il conseille donc à François de reporter le moment où il retirera cette rente. Par contre, il doit appeler Retraite Québec pour obtenir davantage de détails sur les mois qui seront pris en compte dans le calcul de la moyenne de ses revenus pour établir le montant de sa rente. Parce que les mois avec les revenus les plus faibles sont exclus du calcul, mais il y a des limites !
« Probablement que reporter la rente de trois ans sans qu’il ait de revenus ne l’affectera pas, mais la reporter de cinq ans risquerait de l’affecter, alors mieux vaut vérifier », indique le planificateur financier.
Si Retraite Québec confirme à François que trois ans représentent le maximum qu’il peut attendre pour ne pas être affecté négativement, il verrait donc sa rente augmentée de 25 % s’il la demande à 68 ans et il pourrait, pendant ces années, piger dans son REER.
« Il y a seulement 5 % des gens qui maximisent leur montant reçu du RRQ, alors que cela fait une très grosse différence sur le plan de retraite », affirme André Lacasse.
Un train de vie réaliste ?
Le planificateur financier s’inquiète toutefois d’une chose : le train de vie de François, avec 35 000 $ par année, est-il vraiment réaliste ?
« Ce n’est pas beaucoup d’argent, surtout qu’il a quand même actuellement environ 53 000 $ net annuellement, indique André Lacasse. Certains sont capables de vivre avec aussi peu que 35 000 $, mais plusieurs aussi oublient des trucs dans leur budget, comme le coiffeur, l’animal de compagnie, etc. »
Il recommande donc à François d’aller récupérer les grilles budgétaires très détaillées de l’Autorité des marchés financiers (AMF) et de refaire l’exercice.
> Consultez le site de l’Autorité des marchés financiers
Travailler un peu plus longtemps ?
Si c’est plutôt 40 000 $ que François devrait prévoir comme budget annuel, il n’y a pas de raison de paniquer.
« Pour arriver, il aurait seulement à travailler jusqu’à 67 ans, indique André Lacasse. C’est en considérant qu’il recevrait sa pension de la Sécurité de la vieillesse à 67 ans, mais sa rente du RRQ, toujours à 68 ans. Ces quelques années de travail de plus feraient une grande différence parce que, pendant ce temps-là, il n’aurait pas à vivre sur ses économies qui continueraient de faire du rendement. »
* Bien que le cas mis en lumière dans cette rubrique soit réel, le prénom utilisé est fictif. Consultez votre conseiller financier!
source : La Presse MARTINE LETARTE COLLABORATION SPÉCIALE