À 78 ans et toujours bien en selle dans son bolide, le camionneur Robert Mercier n’est pas près de prendre sa retraite. Le nombre de personnes de 65 ans et plus qui, comme lui, continuent de travailler a triplé depuis 15 ans pour atteindre un nombre record, révèle le plus récent Portrait des personnes aînées au Québec.
CE QU’IL FAUT SAVOIR
- Le nombre de personnes aînées sur le marché du travail a triplé entre 2005 et 2021.
- L’âge moyen de la prise de la retraite recule au Québec.
- La plupart des aînés se disent satisfaits de leur vie sociale.
Bien qu’il travaille moins aujourd’hui qu’il y a quelques années, l’idée de la retraite n’a jamais effleuré l’esprit de Robert Mercier. Pour l’ancien policier devenu camionneur il y a plus de 20 ans, le travail lui aura permis de se « garder jeune ». À bord de son camion, M. Mercier a trouvé une façon bien à lui de lutter « contre la solitude à la maison » qui, croit-il, guette bon nombre de personnes aînées. Et il est loin d’être seul à faire ce choix.
À 78 ans, Robert Mercier occupe un emploi de camionneur, une façon pour lui de se « garder jeune » et de combattre la solitude.
En 2021, quelque 170 600 travailleurs étaient âgés de 65 ans ou plus, un chiffre qui s’élevait à 57 000 en 2005, selon le portrait rédigé par l’Institut de la statistique du Québec (ISQ).
Cette croissance s’explique évidemment par l’augmentation du poids démographique de cette tranche d’âge, le nombre d’aînés ayant doublé durant cette période. Mais on note également qu’une part grandissante demeure active après 65 ans.
Depuis 15 ans, le taux d’emploi est passé de 16,1 % à 25,5 % chez les hommes entre 65 et 69 ans et de 9,1 % à 15,7 % chez les femmes du même groupe d’âge.
On observe également une tendance à la hausse de l’âge moyen de la prise de la retraite. De 60,1 ans en 2006, il a grimpé en 2021 à 63,7 ans. L’étude révèle par ailleurs que les hommes ont tendance à prendre leur retraite deux années et demie plus tard que les femmes (64,8 ans contre 62,2 ans).
Valoriser le travail des aînés
Le président de l’Association québécoise de la quincaillerie et des matériaux de construction (AQMAT) se réjouit de la présence d’un plus grand nombre d’aînés sur le marché du travail. Richard Darveau estime que les gens qui décident de continuer à travailler au-delà de l’âge de la retraite le font avant toute chose « pour se sentir utiles ». « Le gain financier est intéressant, mais secondaire. »
M. Darveau estime par ailleurs que le client et les autres employés bénéficient eux aussi de l’expérience de cette main-d’œuvre plus âgée qu’il qualifie de « pouvoir gris ».
Bien que les chiffres démontrent une tendance claire, la présence accrue des aînés sur le marché du travail n’est pas la panacée, et la pénurie de main-d’œuvre guette toujours nombre de commerces. De l’avis de M. Darveau, il n’y a pas abondance de « têtes grises » dans les quincailleries. « Elles demeurent trop peu nombreuses, on en voudrait encore davantage », affirme-t-il. Et pour les attirer, il estime qu’il y aurait lieu de valoriser davantage le travail des aînés – et de revoir les incitatifs financiers. « On n’a pas encore un système fiscal qui favorise le maintien au travail [des personnes aînées] », déplore-t-il.
Les travailleurs aînés œuvrent généralement dans des secteurs d’emploi différents des personnes plus jeunes. Alors que pas moins de 30,5 % des personnes de 25 à 64 ans travaillent dans les services d’enseignement, de soins de santé et d’assistance sociale et dans les administrations publiques, la part des 65 ans et plus qui fait de même est de 20,4 %.
Vie sociale active
Le portrait des aînés brossé par l’ISQ souligne également que les trois quarts des personnes aînées souffraient en 2017-2018 d’au moins une maladie chronique. Pourtant, elles se percevaient à 81 % comme en bonne, très bonne ou excellente santé, en 2021.
Qui plus est, près de la moitié (44 %) des aînés affirmaient être très satisfaits de leur vie sociale, soit bien plus que pour les groupes plus jeunes (27,1 % des 15 à 24 ans).
En raison de la progression plus rapide de l’espérance de vie des hommes, la proportion de femmes parmi les personnes aînées perd du terrain. Alors qu’elles représentaient 59 % des personnes âgées en 2001, elles comptaient, 20 ans plus tard, pour 54 % de ce groupe d’âge.
À noter que les données sur la santé et le bien-être excluent les personnes vivant en établissement institutionnel, comme les CHSLD ou les résidences pour aînés (RPA).
Source:
LA PRESSE, 19 mai 2023